Le Rock’n’Râleur vous livre ses anecdotes que lui inspirent des célèbres Gimmicks Rock qui demeurent dans son cœur et dans son froc. Aujourd’hui, I Wanna Be Your Man des Beatles !
Ce gimmick du titre des Beatles, I Wanna Be Your Man, qui a été repris aussi par les Rolling Stones, me renvoie à mon électrophone d’ado, bleu avec des bandes grises autour du haut-parleur, sur lequel j’avais collé une photo de Chuck Berry. Mon idole absolue.
À tel point que je ne voulais même pas entendre parler des Beatles ou des Rolling Stones, quand les nanas en sixième/cinquième apportaient leurs disques. Moi, je ne voulais pas le savoir. C’était Chuck Berry et rien d’autre.
Après j’ai écouté et je me suis dit : « Merde, quand même ! » …
Toute ma vie tournait autour de cet électrophone. J’y pensais en classe, dans le car, en sport… Je n’avais besoin que de lui. Aussitôt rentré, je me jetais sur mon électrophone. Et ce titre, I Wanna Be Your Man, le symbolisait.
À l’époque, on avait encore des besoins rudimentaires. On aspirait à une paire de pompes, une fringue, des disques, de quoi prendre un pot avec des potes… Et les adultes, pareil. Ils aspiraient à avoir un frigo plus grand, une télé. Y’avait pas encore cette frénésie de créer des besoins.
Maintenant, t’es là, t’as pas spécialement de besoins, mais on t’insuffle mine de rien qu’il te manque quelque chose, que tu vas avoir besoin d’un truc.
Nous vivons, depuis quelques années déjà, une ère de création de besoins. C’est devenu une industrie. À l’origine, on aspire juste à avoir un boulot, un toit pour abriter sa famille et de quoi se nourrir et se vêtir.
Et maintenant, y’a des mecs qui se réunissent autour d’une table ovale et qui se disent : « De quoi on pourrait leur faire avoir un besoin impérieux, à ces cons ? » Je ne parlerai pas de la technologie en général et du téléphone cellulaire en particulier, dont on se passait très bien avec un téléphone fixe chez soi et des cabines à pièces un peu partout. Après, y’a eu les cartes. Et après, fini. Portable ou rien. Mais bon. C’est utile in situ. Paumé ou en panne en rase campagne.
Non, ce qui m’a marqué en création de besoins voici une dizaine d’années, c’est la patinette. Bon maintenant c’est acté que tout le monde est en patinette, de 7 à 77 ans comme les lecteurs de Tintin, mais du jour au lendemain quand j’ai vu des sexas, en costard et Samsonite au guidon, patiner comme des chenapans sur les trottoirs, ça m’a fait drôle.
Je me suis dit : « Ouf ! Heureusement que ça a été lancé ce truc, c’est quand même bien pratique« … Parce qu’évidemment, on s’habitue à tout. C’est ça la force des créateurs de besoins, c’est qu’ils savent qu’on s’habitue à tout. Bon, maintenant la patinette est partout, alors le sujet âgé a l’excuse de la généralisation.
I wanna be your man… Je voudrais être ton homme. Je voudrais que tu aies besoin de moi. Oui, mais on ne se contente pas de ça. On ne se contente pas du besoin sensuel de l’autre, du besoin affectif de l’autre. Non. Faut des objets.
Je ne parle pas des sex toys, attention ! Je suis sûr que les mêmes « commerciaux » pourraient lancer la petite hélice éolienne multicolore qu’on se met dans le fondement et que ça marcherait.
Vous savez, le truc des gamins. Ça tourne quand y’a du vent. Ça deviendrait indispensable. Tu sors de chez toi et tu te rends compte que t’as oublié ton hélice à trou de balle et tu remontes fissa, paniqué, comme si t’avais oublié ton portable. Création de besoins…
Cette époque arrive à me faire dire que c’est bien foutu la vie. Parce qu’heureusement, y’a la mort. Comme disait Dupontel dans un sketch.
Et donc, s’ils se penchaient plutôt sur le besoin qu’on nous foute la paix. Je parle bien sûr pour les gens raffinés, parce qu’il y en a beaucoup qui ont besoin qu’on les occupe. Et qu’on les fasse chier surtout. À longueur de temps. Comme ça, ils ont l’impression d’exister. Ils ne veulent pas avoir la paix. C’est pour ça qu’il y a la guerre partout. Ça occupe la guerre. Ce besoin de sang, de foutre le bordel.
Je ne dis pas qu’il faut un monde de bouddhistes non plus. Du coup, les commerciaux ne feraient plus affaire du tout. Les créateurs de besoins seraient à la cave. Ils feraient la quête avec un godet en carton à tous les coins de rue.
Mais bon. Tout va bien.
Résumons ça comme ça. Tout va bien.
Francis Basset
Lire le Gimmick Rock du Rock’n’Râleur, c’est bien.
L’écouter, c’est très bien aussi… En plus, il y a la guitare !