Marka, Gainsbourg, Kraftwerk… le Sens de l’Histoire

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C’est l’histoire d’un Français, de quatre Anglais, de quelques Allemands et d’un Belge. Et mieux qu’une blague usée, c’est une histoire d’albums portés par l’envie du récit. Il était une fois l’album concept.

Le ciel s’éclaircit enfin… Si si ! Cet été, l’équipe de Paris Bazaar pourra peut-être retourner dans un bar pour picoler jusqu’à tomber des tabourets sur lesquels elle tentera de se tenir droit. Nous pourrons peut-être tous retourner vibrer au théâtre, frissonner au cinéma, ou chialer d’émotion pendant un concert…

Bon, pour le moment, c’est pas encore gagné ! Ne nous racontons pas d’histoires… Ou plutôt si, mais écoutons-les par l’intermédiaire de concept albums.

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Le plus connu est sans aucun doute Sgt. Pepper’s Lonely Heart Club Band. L’album des Beatles, sorti en 1967 est un véritable chef d’œuvre. En France, une des principales références du genre est l’Histoire De Melody Nelson. Construits autour d’un personnage féminin divin représenté par Jane Birkin, les onze titres de l’album sont autant de chansons incontournables, composées pour la plupart par le grand chef d’orchestre Jean-Claude Vannier. Gainsbourg était l’homme des concept albums, que ce soit avec L’Homme A Tête De Chou ou, beaucoup plus tard, You’Re Under Arrest.

En Allemagne, un groupe est lui aussi habitué des concept albums : Kraftwerk. Le groupe de Düsseldorf a notamment créé deux chefs-d’œuvre du genre Radio-Activity et The Man Machine. Sorti en 1975, Radio-Activity explore le thème de la radioactivité, évidemment, la recherche dans le domaine dont l’une des figures de proues n’est autre que Marie Curie, d’ailleurs citée dans la chanson Radioactivity.

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L’album est d’une froideur à rendre jaloux n’importe quel Inuit faisant un jogging torse nu par -35°C au Groenland.  Quoi de plus logique que de s’intéresser à un tel sujet quand on appartient à un groupe dont le nom signifie «Centrale Electrique» ?

Autre album assez futuriste de Kraftwerk, The Man-Machine est sorti en 1978. On ne se marre pas plus en l’écoutant, mais cet album avant-gardiste, avec ses six titres sur lesquels homme et robot ne font plus qu’un, a eu énormément d’influence sur la musique des années 80. La musique synthétique inspirera un nombre hallucinant de groupes, allant de Human League à Depeche Mode, en passant par Art Of Noise, Indochine, Visage, ou encore les VRP officiels à gourmettes de chez Bontempi, j’ai nommé Daft Punk, qui ont retiré leurs casques pour pouvoir compter les biffetons plus facilement.

Quelques années plus tard, en 2003, Kraftwerk sort Tour De France Soundtracks, consacré logiquement au cyclisme, et dont les premières compositions avaient été écrites vingt ans plus tôt, en 1983. Avec leurs histoires extraordinaires et leur musique électronique parfois hallucinatoire, les précurseurs de la techno et de la musique industrielle font, sans aucun doute, partie des plus grands compositeurs de concept albums depuis la deuxième moitié du vingtième siècle.       

Beaucoup plus récemment, il y en a un autre qui raconte des histoires parfois un peu barrées. Il est belge. Il ne s’appelle pas Arno, ni Jacques Brel, encore moins Plastic Bertrand, Stromae ou Frédéric François. Le gars un peu parti, qui se trimballe souvent avec une guitare et parfois une veste à paillettes se nomme Serge Van Laeken… Toujours pas ? Son pseudo est beaucoup plus court : Marka. Certains l’ont découvert grâce à ses deux rejetons qui connaissent actuellement un énorme succès : Angèle et Roméo Elvis. Et pourtant…

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Dans les années 80, il a appartenu à deux grands groupes belges nommés Allez Allez et Les Cactus avant de se mettre à son compte au début des années 90. Bien lui en a pris. En 1996, il débarque chez nous avec Accouplés, La Poupée Barbue, Pour Un Flirt Avec Moi, ou encore le génial Elisa Prétend. Tous ces morceaux figurent sur Merci D’Avance, son deuxième album solo.

L’homme est un bosseur. Malgré des déboires avec des maisons de disques et en dépit d’un succès pas forcément à la hauteur de ses espoirs, il ne baisse jamais les bras. Comme lors d’un concert à l’Européen au début des années 2000 où, devant une salle quasi-vide, il passait dans les rangs serrer la main de chaque spectateur avant de donner un spectacle impressionnant. Un moment mémorable pour ceux qui y étaient… Et j’en étais !

L’artiste qui ne lâche rien en est à son quatorzième album solo, live compris. Ce qui est très énervant chez Marka c’est qu’il sait tout bien faire. Preuve en est avec Maftaboule, titre qui ouvre ce nouvel album intitulé Terminé Bonsoir. Ce morceau instrumental est digne d’une B.O. d’un film d’Ennio Morricone avec Marka en guise de cow-boy, et une moto en guise de cheval.

Dans Havana Calling, autre invitation au voyage, on se barre à Cuba. Serait-ce un hommage au musicien Orlando Valle ?… Quoi qu’il en soit, en fermant les yeux, on s’imagine au soleil, avec chemise à fleurs moches, pantalon blanc de maquereau new-yorkais, adossé à une vieille Ford bien pourrie tout en sirotant un rhum ambré…

Quand Marka se met à chanter en espagnol on ne reconnaît presque pas sa voix. Par contre, lorsqu’il chante dans notre langue, on observe avec plaisir et bonheur qu’il manie toujours aussi bien l’ironie et l’humour noir comme dans Avant d’Être Moi, sorte d’ego trip délirant aux  fortes tonalités rock ou Avant Après, un titre déjà sorti en 2001, réarrangé et réenregistré avec Blankass. 

Le chanteur sait aussi faire dans la douceur. Il le prouve avec Des Hauts, Des Bas (rien à voir avec Stephan Eicher), morceau presque noir et détonnant sur cet album pourtant assez enjoué. Amateur de reggae, et de World Music, il s’amuse avec Si Demain Je Reviens, où il se demande quelle sorte de chose assez putassière il peut faire pour avoir du succès. C’est simplement hyper bien vu et tellement actuel.

Dans Garanti 100%, il évoque un loser, un de ces mecs à qui on la fait sans forcer, sans même avoir à insister. C’est beau, marrant, et triste à la fois. Un peu comme Ne Me Le Dites Pas, terrible et émouvant morceau sur la vieillesse, renforcé par des arrangements sublimes.

Il y a aussi Le Daron, avec une musique qui semble tout droit sortie d’un album de François de Roubaix, où il évoque sans retenue et presque avec admiration, sa brillante descendance qui assure sous les projecteurs et qui a bossé sur cet album.

Et puis, il y a deux ovnis de danse de musique de djeuns enregistrés avec sa moitié, la comédienne Laurence Bilbot. Poulette, et Tu Es Formidable sont deux moments de folie absolue hyper bien foutus. Quant à En Bas, il signe la fin de la récré avec un morceau western, mini scénario qui parle de Bruxelles mais qui pourrait aussi bien se passer à Paris ou à Londres…

Même si on ne l’entendait plus trop ces derniers temps, même s’il s’amusait à faire des géniaux Facebook Live trop courts, Marka n’a rien perdu de son talent, de sa splendeur. Rocker, il est le trait d’union entre Joe Strummer et Daniel Darc, à qui il ressemble d’ailleurs fortement sur la pochette de l’album.

Marka est un grand nom du rock européen beaucoup trop méconnu ! Terminé Bonsoir est son nouvel album. On espère vraiment que ce ne sera pas le dernier…   

Laurent Borde

Marka : Terminé Bonsoir / At(h)ome

Kraftwerk : Radio-Activity et The Man Machine / Parlophone 

 

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