Hier soir, salle Pleyel à Paris, la 30ème Nuit des Molières. Une première pour Paris Bazaar, qui était convié à la réunion de famille. Ambiance.
Ça commence juste en face. À la terrasse d’un café. C’est déjà un ballet. Les techniciens de France Télévisions qui achèvent leur repas, la soirée sera longue, la file indienne des premiers invités en tenues de soirée, costumes sombres et robes longues de créateurs drôlement inspirés, et les forces de l’ordre qui essaient tant bien que mal d’en mettre un peu. Pas franchement habitués à marcher dans les clous, les saltimbanques.
On s’embrasse, on s’effusionne, on s’émulsionne. Annie Duperrey est là juste à côté de nous, Jean-Luc Moreau la salue. Deux créatures, filles ou garçons ou les deux ?, fendent la foule. L’ambiance est légère, l’air est lourd et le ciel menace. Il aura l’élégance d’ouvrir les vannes plus tard. Là, ce sont les portes de Pleyel qui s’effacent enfin.
On croise Nicolas Vaude, la dernière fois c’était au théâtre de Paris chez Pinter et il faut croire que ça crée des liens alors on échange et on s’en souhaite une belle. La sécurité fait son job. On est déjà dans le hall. Orly ou Saint-Arnoult, le premier week-end d’août. Catherine Ceylac, tout sourire, se charge d’aller retirer ses invitations tandis que Claude Sérillon, sur le côté et fermé comme un jour de grève, ne la lâche pas du regard. Tiens, on entend que ça aboie et on voit que ça crépite un peu plus loin. Photo call.
C’est au volume sonore qu’on mesure la popularité du sujet. Et c’est franchement bruyant d’un coup. Yvan Attal est venu avec Charlotte. Tout s’explique. Ils sont marrants ces photographes. Une petite dizaine. Mêmes flashs, mêmes boîtiers, mêmes angles, on se dit qu’ils vont probablement faire la même photo. On cherche d’ailleurs du regard le photographe de Paris Bazaar, Jean-Marie Marion. Comme à son habitude, il est sur un autre axe. Question de goût. Et comme à son habitude, il s’amuse. Là, c’est avec Bruno Solo, nommé pour Baby, qui du coup s’amuse aussi.
Une paire de bises plus tard, on croise son binôme, Yvan le Bolloch. Une autre paire de bises après, c’est Bruno Putzuluqu’on salue à son tour. Et ça s’accélère. Voici qu’arrivent Jacques Gamblin, Pierrot dans sa lune, et Jean-Pierre Darroussin comme dans sa bulle. Et puis Marine Delterme, Alice Nevers le juge est une femme, au bras de Florian Zeller. Ils maîtrisent l’exercice, ces deux-là. Sourires, flashs, merci, aux suivants ! En parlant d’Alice Nevers, on échange un clin d’œil avec Florence Pernel. Pas plus, faut avancer, faut y aller ! Alix Poisson, la maman de Parents Mode d’Emploi, s’en moque et prend son temps. C’est pas tous les jours.
L’attaché de presse des Molières, Alain Ichou impressionne de calme et de sérénité mais il a un chrono dans la tête. On entend la voix dans les hauts-parleurs nous rappeler que dans trois minutes, on lance le générique. Euh, elle n’avait pas déjà dit ça, il y a trois minutes ?? Le grand hall de Pleyel s’est vidé. Top générique. En salle de presse et dans un silence de cathédrale, on voit Zabou Breitman arriver sur la grande scène et ouvrir officiellement la 30ème Nuit des Molières. C’est joli ce qu’elle dit. Le souvenir de ses parents et leur amour du théâtre. Le scénariste Jean-Claude Deret et la comédienne Céline Léger qui était Québécoise et disait Molière avec l’accent de la Belle Province. La salle ne se moque pas mais rigole. C’est frais, spontané, simple, tendre et léger.
Pendant deux heures peut-être, guère plus, ils vont tous défiler. Passant de la scène à l’espace réservé à la presse. C’est aussi ça la soirée des Molières quand on n’est ni à cour ni à jardin, encore moins dans la salle. On la vit comme vous, devant une télévision. À cette différence qu’à peine dit le dernier merci, les artistes se tiennent devant vous comme s’ils étaient sortis de l’écran. Les photographes vont à nouveau faire les mêmes photos, la statuette en plus. Et les confrères vont saisir à chaud les mêmes impressions. Cinq, six minutes et zou, merci beaucoup. Pour l’aparté, vous repasserez. Pour le plaisir du singulier, vous pouvez vous brosser. C’est pas la soirée.©Jean-Marie Marion
Quand même, parfois, c’est émouvant. Comme Christine Murillo, molièrisée dans le Tartuffe mis en scène par Michel Fau, émue jusqu’à en trembler encore, on se dit que sa béquille ne va pas la tenir plus longtemps. Ou Marina Hands, élue pour Actrice de Pascal Rambert, toute en émotion contenue. C’est tonitruant aussi et déconnant comme une cour d’école à l’heure de la récréation, lorsque déboule comme une tempête l’équipe du Gros Diamant du Prince Ludwig, avec leur Molière de la meilleure comédie qui passe de main en main.
C’est étonnant, encore. Quand arrive Blanche Gardin, qui vient de se remettre à elle-même le Molière de l’Humour pour Je parle toute seule. Elle est comme sur la scène, il y a trois minutes. Elle est là et ailleurs. Elle est belle et irréelle, bouclée comme une actrice des années 30. C’est magique, enfin. Comme Jacques Gamblin. Primé pour 1 heure 23’14 et 7 centièmes, il s’attarde aux côtés de son complice Bastien Lefèvre. Tous les deux posés sur un nuage, le ciel leur appartient. Un membre du staff suggère à Jacques de regagner la salle, il veut surtout s’en griller une. Il vagabonde. Rien ne presse, savourons l’instant. La réalité et ses contraintes peuvent bien attendre.
Et puis, un dernier merci à tous et c’est terminé. La salle se vide, un autre spectacle commence. Charlotte Gainsbourgs’évapore, on ne voit plus que ses longues jambes dans le lointain. Dephine Ernotte, la patronne de France Télévisions, prend la pose. Françoise Nyssens, la ministre de la Culture, rayonne. Jean-Pierre Kalfon se marre. Manu Payet, un peu moins. Jérôme Commandeur, un peu plus. Philippe Torreton s’éclipse sans regarder personne. Jean-Pierre Darroussin cherche un pote, il s’appelle Hyppolite. Le président des Molières, Jean-Marc Dumontet serre des mains. On serre celle de Pierre Santini. Jean-Philippe Daguerre est aux anges, comment ne pas l’être quand on repart avec quatre Molières, qui sont venus récompenser Adieu Monsieur Haffmann. Alex Lutz s’aide d’une canne pour descendre l’escalier. Un peu plus loin, Michel Bouquet et Nicolas Briançon discutent comme deux vieux copains.
Il y a des heureux et des déçus qui prennent sur eux. Les reines et les rois du soir, et puis les oubliés. Ceux qui sont dans la lumière et les autres rendus à leur pénombre. Au moins, ceux-là n’auront pas à se poser la terrible question: avec ce Molière, maintenant, que vais-je faire ??
C’est juste et injuste. C’est tout le théâtre et ce n’est que du théâtre. C’est la loi du genre, la règle du jeu. Tiens, à ce propos, sur la route du retour, le chauffeur nous raconte sa soirée. Lui aussi, il a vibré. Au stade de France, la sélection tricolore, sans forcer, a mis deux pions aux Irlandais. En toute amitié.
O.D
Le palmarès de la 30ème Nuit des Molières, c’est Ici