Londonien et Parisien, il est auteur, acteur et parolier. Il est l’homme aux mille chansons. Il s’appelle Boris Bergman. Et souvent, il se souvient… Aujourd’hui de Guy Peellaert.
-« C’est toi, Guy ? »
–« Ça ne va pas tarder à l’être » , répond Lady Victoria numéro 5 en balançant ses 24 images seconde sur l’écran blanc de nos nuits noires.
John Wayne fait des misères à Natalie Wood. John Ford les fait passer de l’ombre à la lumière. Jean-Pierre Dionnet a enlevé ses lunettes de plaisir. Ce n’est pas tous les jours qu’il aime tous les gens réunis dans une même pièce. Guy Peellaert et son auteur fétiche s’amusent de cette Prisonnière du Désert en V.F. La collure est un être capricieux. Elle casse le film. J’en profite pour demander à Nick Cohn ce qu‘il veut boire.
–« Sorry , but I’m on the dry… » ( je me suis mis au sec… ?) répond l’auteur des textes de Bye Bye Rock (Rock Dreams pour la version française).
Guy s’est déjà bu son thé dans la cuisine et Sara Jane n’en boit plus.
Guy caresse le poster de Buddy Holly et ce n’est qu’un début… _
-« C’est toi Guy ? »
Le vieux sorcier navajo qui ressemble étrangement au dessinateur belge, ramasse la petite pierre grise aux reflets bleus. Il regarde le nuage de la même couleur et chuchote à l’arbre millénaire :
–« Quand je trouve un petit galet rond comme celui-ci, je me dis qu’il est impossible que toutes les choses rondes n’aient pas de rapport entre elles. »
L’arbre millénaire est d’accord. Le sorcier rentre dans son tipi, il doit repeindre l’aurore à l’arrière d’une Electra Glide résignée… Pravda la bikeuse aura un autre visage si la Faucheuse regarde pour une fois de l’autre coté.
Le train fantôme quitte la gare de Lyon ou du Nord, va savoir. Il n’a pas plus de deux wagons. Au fond du deuxième, et je devrais dire du second puisqu’il n’y en a que deux, Philippe Manœuvre, l’organisateur du Festival du film Rock de Val d’Isère coache l’attachée de presse tout en se défaisant de l’impressionnante parka de l’armée britannique en cette époque reculée où elle se gelait les fesses en Norvège à la veille d’un raid sur les skieurs d’ Adolf. Il est vrai qu’à Val d’Isère, on a froid.
À l’avant, les Quatre Mousquetaires de la nuit blanche : Véronique Genest, Jean-Pierre Kalfon, le chanteur Paul Ives et moâ…
Arca , le chanteur du groupe Matadors, vient de temps en temps partager nos nombreux rires et raser avec nous les pâquerettes de nos jeux de mots discutables. Côté fenêtre, Laurel profite du sommeil d’Hardy pour lui piquer les petits sandwiches aux œufs et au cheddar, chers à mes amis British.
Laurel est anglais, ne l’oublions pas…
L’homme au beau regard triste accroche l’épaule de Laurel en allant aux toilettes, il s’appelle Guy Peellaert et demandera le lendemain au Philou (Manœuvre) à être présenté au quatuor de bras cassés hilares du petit train fantôme.
L’homme de la SNCF qui compte les passagers porte les lunettes de Buddy Holly… c’est bon signe.
Je connais Guy P. de nom : Bye Bye Rock, la pochette du Diamond Dogs de Bowie , Vartan-Jodelle, Hardy (Françoise)-Pravda… Et comment ne pas se souvenir de Jeux de Massacre d’Alain Jessua, où Jean-Pierre Cassel incarne un dessinateur de bande-dessinée auquel Guy P. vient de prêter ses crayons de couleurs ?
Oh Guy, il m’aura fallu des années pour réaliser que tu as donné ton regard de labrador ostendais au Buddy Holly de mon disque hommage.
…Ton port d’épaule au tueur à gages de mon deuxième bouquin (pas le « second »… Y’en a eu un troisième…)
…Ton goût des sirènes pour la pochette du disque de Lio, Wandatta…
Nous ne serons jamais allés jusqu’au bout de notre projet Bashung-bibi en dessins… tu ne voulais pas qu’il nous arrive la même chose qu’avec toi et Nick Cohn (Saturday Night Fever… et bien sûr Rock Dreams) .. mais que de jolis hold-ups ludiques.
La préface anglaise de Rêves du 20é Siècle, illisible sur mon cahier Astro Boy, puisque recouverte de belles tâches pourpres de Bortsch maison. Un fax (1) où je me dessine en aveugle. Le phylactère interroge :
–« C’est toi, Guy ? »
La réponse du grand frère est quelque part au milieu de ces pages …
Quelque part au cul de la lune sur la plus haute montagne de la planète des cœurs grandissants, Méliès redessine sur le sable la roquette s’introduisant dans l’œil de l’astre de nuit.
Guy lui suggère de faire chevaucher la fusée par un Mick Jagger en jarretelles…
Marie-Georges Jean (hé oui) Méliès hésite. Il fait oui de la tête. Après tout, il a toute l’éternité pour convaincre Guy Peelleart qu’il s’est trompé… et puis c’est l’heure du goûter…
Les chiens de diamant entourent Bowie.
Le sorcier navajo joue aux osselets avec les galets. Tous applaudissent le nouveau couple de l’espace : Peelleart et Méliés saluent, la musique des mains rebondit d’étoile en étoile…
Une étoile se découd du manteau de Gogol. Ça arrive…
Et ça suffit pour que ceux qui vous ont aimé se souviennent…
Boris Bergman, le presque dernier des Mohicohen
Note(s)
(1) le fax est une machine qui a succédé au télex et aux pneumatiques de toute sorte. Il m’a permis d’envoyer des dessins-questions à Guy P., lui permettant ainsi de m’envoyer un dessin-réponse
Si vous voulez en savoir plus, on m’a dit que google avait réponse à tout.
Au « GUY » l’an neuf, peut-on lire dans cette évocation qui rajeunit les souvenirs d’une époque qui s’éloigne ! Les liens de la mémoire seraient-ils les traits d’union de la tendresse ?
Merci au dernier des Mohicohen de l’art « Rock » !