Red Hot Chili Peppers : Souvenirs Pimentés

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En ces heures incertaines et anxieuses, certains souvenirs peuvent réchauffer nos âmes meurtries. Hier encore, nous sautions plus haut avec Red Hot Chili Peppers. La nostalgie a parfois du bon.

Envie d’oublier cette pandémie qui n’en finit pas et nos jours masqués ? Et si on braquait la De Lorean de Doc Emmet Brown pour s’offrir un retour dans le passé ? En 1991. C’était hier, c’était tout à l’heure. Souvenez-vous…

Cette année-là commence avec un beau bordel. La Guerre du Golfe débute le 17 janvier avec l’opération Tempête du Désert pour mettre fin à l’occupation du Koweït par l’Irak. Elle se terminera le 28 février avec une victoire de la coalition surarmée.

Le 30 juillet de la même année, les Américains et les Russes, qui se vouaient jusque-là une haine cordiale, réussissent à se rencontrer et à se parler face à face, ce qu’ils choses n’avaient pas fait depuis 1947. Les deux pays s’engagent même à diminuer leur armement nucléaire de 30%… sur le papier du moins.

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Quelques mois plus tard, la Birmane Aung Saan Suu Kyi reçoit le prix Nobel de la Paix en raison de son opposition à la junte militaire et de son militantisme pour la démocratie. Elle avait déjà reçu le prix Sakharov en 1990, décerné aux personnes défendant les droits de l’homme et des libertés. On sait ce qu’elle en fera en 2016, lors de son arrivée au pouvoir, en s’acharnant sur les Rohingya avec l’aide de l’armée.

Chez nous, 1991 ne débute pas mieux avec le déclenchement du premier plan «Vigipirate», suite aux tensions de la Guerre du Golfe. Il sera arrêté le 26 avril. Toujours en janvier, la loi Évin est mise en place. On ne fume plus sur les lieux de travail, ni dans les transports en commun.

En mai, Rocard jette l’éponge et donne sa place de premier ministre à Édith Cresson. Pour la première fois, une femme est placée au plus haut rang de l’État. Elle n’en profitera que jusqu’au 31 mars 1992. Quelques jours plus tard, en juin, Jacques Chirac s’illustre tristement à Orléans en évoquant la problématique de l’intégration et notamment «le bruit et l’odeur» dont Zebda fera une chanson.

Blood Sugar Sex Magic-Cover-ParisBazaar-Borde

Musicalement, un groupe sort la tête de l’eau. Ils sont quatre et ont la bonne idée de mélanger metal et funk pour donner une sorte de fusion unique. Avec Blood Sugar Sex Magik, les Red Hot Chili Peppers explosent tout sur leur passage !

Rythmiquement, ce sont des tueurs. La basse de Flea, le tatoué torse nu pile électrique qui semble né sur un tapis de course, est à la fois ronde et agressive comme sur The Righteous And The Wicked.

Quand il se met à slapper sur Suck My Kiss, qui devait s’appeler Suck My Dick (Suce ma Bite) mais dont le titre initial, allez savoir pourquoi, avait été refusé par la maison de disque, on ne peut qu’avoir envie de tout casser en écoutant le morceau tant il est brutal.

Flea est un musicien probablement venu d’une autre planète tant il sait tout jouer avec brio.   

Chad Smith, le batteur, n’est pas pour rien dans le succès du groupe. Sa frappe sèche et syncopée fait le boulot. Sur The Power Of Equality, Naked In The Rain (sur lequel l’infatigable Flea slappe encore), ou le tube planétaire Give It Away, Chad Smith ne joue pas. Il excelle. Sa puissance est hors-normes. Il le démontre également sur le titre Blood Sugar Sex Magik, quasiment un standard de metal. 

Et puis, il y a la guitare de John Frusciante. À l’époque, le New-Yorkais a 21 ans. Il se lâche sur tous les morceaux. Ses solos, soutenus par une rythmique hallucinante, à l’image de celui de My Lonely Man, sont des claques monumentales, à vous passer l’envie de tendre la joue gauche.. Il quittera le groupe quelques mois plus tard, en 1992, pour cause d’addiction à l’héroïne et à la cocaïne. Il ne reviendra avec les Red Hot qu’en 1999 pour en repartir en 2009 et y revenir en 2019. 

Au chant, Anthony Kiedis est un mec à la vie peu ordinaire. Son père était un dealer de came bien connu du tout Hollywood, avec qui il avait l’habitude de prendre de la marijuana et de la cocaïne dès l’âge de 11 ans. Dans ses mémoires, il raconte qu’il voulait accompagner son père en boîte de nuit où celui-ci vendait notamment de la drogue à Keith Moon, le batteur des Who.

Sorti brillamment du lycée et de la fac où il a étudié l’écriture, il créé son premier groupe, Defunkt avec le guitariste Hylel Slovak qui meurt d’une overdose en 1988. Les deux hommes fondent ensuite What is This? en 1982, rebaptisé Red Hot Chili Peppers en 1984. Sir Psycho Sexy, morceau très nostalgique de l’album, semble avoir été composé pour lui, en raison de son rythme entêtant et de ses paroles qui sonnent comme un hommage au guitariste. Anthony Kiedis les interprète avec force et émotion.

Il donne aussi dans l’émotion pour les deux autres tubes mondiaux de l’album, les slows Breaking The Girl et Under The Bridge. Il tire vers le funk rap pour de nombreux morceaux comme Mellowship Slinky In B Major, Apache Rose Peacock, et évidemment l’inévitable Give It Away. Il est même assez déconnant dans la reprise et l’adaptation de They’Red Hot, le standard de blues de Robert Johnson.

Kiedis, sait tout faire, tout chanter, avec virtuosité. C’est un véritable caméléon du chant complètement inégalable. Sur scène, il dégage une puissance et un charisme hallucinant, même si Flea, avec ses roulades et sa façon de terminer les concerts la bite à l’air, l’éclipse par moments. Anthony Kiedis n’est pas un grand chanteur. Il est immense. 

L’année 1991 aura, sans aucun doute, été l’année des Red Hot Chili Peppers, même si la concurrence avec d’autres groupes comme Guns’N’Roses, Soundgarden, Nirvana, ou U2, était plus que forte. Malgré quatre premiers albums passés relativement inaperçus auprès du grand public, Blood Sugar Sex Magik, aura permis au groupe originaire de Californie de décrocher la timbale mondiale en remportant de multiples récompenses, notamment avec le single Give It Away.

Quatre ans plus tard, fort de son succès, Red Hot sort un album encore plus énorme intitulé One Hot Minute. John Frusciante est remplacé par Dave Navarro, guitar hero, surdoué de la six cordes, qui officie d’habitude chez Jane’s Addiction et Porno For Pyros. La tournée qui s’ensuit est fabuleuse. 

Par la suite, et avec le retour de Frusciante en 1999 pour Californication, les Red Hot s’adressent à un public beaucoup plus large, avec des chansons nettement plus pop et beaucoup moins intéressantes. Leurs prestations scéniques sont assez désastreuses, Frusciante, peut-être encore un peu défoncé, se montrant incapable de jouer correctement certains morceaux, dont Give It Away, qu’il avait pourtant contribué à composer.

Les albums qui suivront ne seront malheureusement pas aussi rock, le groupe semblant vouloir sans cesse renouveler son public, devenant presque par moments un groupe à minettes. Les fans de Mother’s Milk ou Freaky Styley sont partis. Les nouveaux arrivants semblent se contenter des titres de Stadium Arcadium ou The Getaway.

Red Hot Chili Peppers est un immense groupe quoi qu’il en soit. Il aura brillamment marqué l’histoire du rock et de la musique en général.

C’était en 91. Toute une époque. Un autre siècle. C’est bon, parfois, de se souvenir… Non ?

Laurent Borde

The Red Hot Chili Peppers : Blood Sugar Sex Magik / Warner

 

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